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Textes, croquis et photos (sauf mention contraire) Claude Beaudevin (1928 - 2021) Présentation et mise en page Bruno Pisano 

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Altitude atteinte par les glaciers dans les Alpes PDF Imprimer Envoyer
Écrit par Claude Beaudevin   
Mercredi, 10 Mars 2010 19:03

Version du 4 janvier 2018

Les grands glaciers quaternaires ont atteint dans les vallées alpines des altitudes très importantes : c'est ainsi qu'à la verticale de Grenoble, le glacier würmien de l'Isère avait sa surface à 1200 m et que le glacier de la Romanche s'élevait à 2650 m au dessus du col d'Arsine. Toutefois les Alpes n'ont, tout au moins au cours de deux dernières glaciations, jamais été recouvertes d'une calotte glaciaire comparable à celles de l'Antarctique ou du Groenland. Les vallées voyaient bien passer de gigantesques fleuves de glace mais les arêtes qui les séparaient émergeaient, en longues crêtes bordées d'innombrables cirques et les principaux sommets n'ont jamais été recouverts.

Nous le verrons plus loin, la surface des anciens glaciers se raccordait, en bien des endroits, à celle des glaciers actuels, signe que la très haute montagne n'était guère plus englacée que de nos jours. Ce fait est corroboré d'ailleurs par l'examen des hauts sommets : les faces, les arêtes sont déchiquetées, reflet d'une érosion périglaciaire (couple gel - dégel) et non lissés par le passage des glaces

Deux méthodes peuvent être utilisées pour déterminer l'altitude atteinte par les glaces dans les vallées alpines :

  1. une méthode théorique, utilisant une formule mathématique qui reflète les propriétés physiques de la glace,

  2. une méthode basée sur l'observation directe du modelé glaciaire dans les paysages, méthode dite d'analyse morphologique glaciaire.


Ces deux méthodes se complètent, mais l'approche théorique du problème ne peut s'appliquer qu'à des vallées suffisamment larges, comme c'est le cas des parties inférieures des vallées du Rhône, de l'Isère et de la Durance. Plus haut dans les vallées, ou encore dans celles trop étroites, les effets de parois se faisaient sentir et la formule ne s'applique plus.

Nos études montrent que c'est au dessus d'une largeur de l'ordre de 4 km que l'approche théorique fournit des résultats valables. En dessous de cette largeur, seul l'examen du modelé glaciaire pourra donc permettre de déterminer l'altitude atteinte par les glaces dans les vallées. Là où elle n'est pas applicable, la méthode théorique fournit toutefois une valeur minimum de l'altitude des glaces.

Pour en savoir plus sur l'approche théorique et son application aux grands glaciers quaternaires.


Les repères morphologiques que l'on peut utiliser pour l'analyse morphologique glaciaire sont les suivants – et le lecteur retrouvera ici quelques-unes des pages qu'il vient de parcourir :

      • les roches moutonnées et autres formes mineures,

      • les épaulements,

      • les moraines latérales et les dépôts glaciaires,

      • les sillons marginaux d'épaulement et de diffluence.

Les épaulements constituent un des repères morphologiques les plus intéressants car, du fait de leur taille, ils sont beaucoup plus pérennes que ceux énumérés ci-dessus. En particulier, ils nous ont permis d'étudier les glaciations antérissiennes dans les Alpes, étude originale que l'on pourra consulter à la page sur les glaciers du Mindel.

Les versants d'érosion glaciaires peuvent également fournir des indications intéressantes.

Les sites témoins

Nous appellons sites témoins les formes de relief créées lors des glaciations et encore visibles de nos jour. L'étude originale qui est présentée ici a porté sur plus de 400 de ces sites porteurs de repères morphologiques, 35 d'entre eux provenant de la littérature et des cartes géologiques et les autres de recherches personnelles sur le terrain.

Ces sites se répartissent essentiellement dans les Alpes dauphinoises et les Alpes du Sud, leur situation étant précisée sur des cartes figurant dans chacune des pages suivantes. Leurs coordonnées exactes sont également indiquées. Nous n'examinerons ici que les principes de base et quelques-uns des résultats de cette étude, renvoyant le lecteur à ces pages complémentaires pour de plus amples renseignements, en particulier à la page sur l'utilisation et les applications de l'analyse morphologique glaciaire.

Comment peut-on déterminer l'altitude d'une surface glaciaire à partir de celles de sites témoins qu'elle a créés ?

Les épaulements

 

 

Nous avions choisi, au début de notre étude, de majorer de 50 mètres l'altitude des sommets d'épaulement pour obtenir celle de la surface glaciaire. Ce chiffre résultait de la traduction chiffrée d'une valeur approximative trouvée sur Internet sous la forme de « l'altitude de la surface glaciaire dépassait de quelques dizaines de mètres celle du sommet des épaulements ».

Une étude plus approfondie nous a montré qu'en réalité il existe deux sortes d'épaulement :

    1. certains d'entre eux, situés à la partie supérieure des contreforts, ont été créés par l'érosion combinée de la Gélifraction avec le Transport des débris par un glacier ou érosion GT. Nous les avons appelés « épaulements supérieurs »,

    2. d'autres, situés à une altitude inférieure dans les contreforts sont dus à l'érosion par les eaux glaciaires latérales ; nous les avons appelés « épaulements de versant ».

Si tous ces épaulements sont bien dus à l'action des glaciers, leurs modes de formation sont totalement différents et, en conséquence, leur relation avec l'altitude de la surface glaciaire est différente :

      • Les épaulements supérieurs se situent à l'altitude de la surface glaciaire au moment de leur formation.

      • Les épaulements de versant, créés par les eaux glaciaires latérales, se situent à l'altitude où s'écoulaient celles-ci, soit enttre 100 et 150 m sous la surface glaciaire.

Plus de détails sur cette question à la page sur la formation des épaulements.

Les clapiers d'origine glaciaire

 


L'altitude fournie par un clapier d'origine glaciaire constitue une valeur minimum : celui-ci se forme par gélifraction d'un bloc erratique ; dans le cas où existent plusieurs clapiers voisins, la prise en compte du plus élevé d'entre eux doit fournir l'altitude de la surface glaciaire si le bloc erratique se situait sur la moraine latérale. Mais il pouvait se trouver légèrement plus bas que celle-ci ou avoir glissé quelque peu après s'être déposé. Dans ce cas, l'altitude de la surface glaciaire devait être plus élevée que celle du clapier. L'altitude de celui-ci constitue donc une valeur a minima de celle de la surface glaciaire.

Les ravinements

 

 

C'est l'inverse dans le cas d'un ravinement : par suite des érosions postglaciaires (en particulier l'érosion régressive), la surface du glacier qui a initié ce ravinement était inférieure à l'altitude actuelle du sommet du ravinement. L'altitude du site témoin constitué par le sommet du ravinement constitue donc une valeur supérieure de l'altitude du glacier.

Les autres éléments d'estimation de l'altitude de la surface glaciaire

 

 

De plus :

  1. La surface du glacier se situait approximativement :

    • au niveau des crêtes des moraines latérales,

    • au niveau ou à un niveau supérieur à celui des dépôts morainiques.

  2. Elle dépassait de :

    • 50 mètres le niveau du fond des sillons marginaux rocheux les plus élevés,

    • 50 mètres celui du fond des sillons marginaux vallonnés les plus élevés,

    • 50 mètres celui du sommet des roches moutonnées.

Ces valeurs résultent de la comparaison, sur les quelques sites qui le permettent, des altitudes de sillons et de moraines latérales voisines. En ce qui concerne les roches moutonnées, il s'agit de la transposition chiffrée de la valeur couramment admise de "quelques dizaines de mètres".

Nous venons de dire "approximativement", nous réservant de préciser ce point dans les diverses pages secondaires que l'on rencontrera au fil de cette étude, en particulier à la page sur l'utilisation et les applications de l'analyse morphologique glaciaire.

 
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Mise à jour le Mercredi, 12 Décembre 2018 19:43