Textes, croquis et photos (sauf mention contraire) Claude Beaudevin (1928 - 2021) | Présentation et mise en page Bruno Pisano |
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Les terrasses de kame |
Écrit par Bruno Pisano | |||||||||||||||||||||||||||||
Dimanche, 23 Septembre 2012 17:38 | |||||||||||||||||||||||||||||
Nous allons présenter ici un élément fréquemment représenté dans nos paysages alpins et qui a été laissé par les glaciers lors de leurs lentes phases de retrait : les terrasses de kame. Définition : « un kame est une formation fluvio-glaciaire qui se présente sous la forme d'une colline irrégulière et composée de sables et de graviers. Les kames sont formés par des sédiments qui se déposent dans une dépression à la surface d'un glacier en phase de retrait, et qui se retrouvent sur le sol à la suite de la fusion complète du glacier. » Par extension, « terrasse de kame » est un terme géologique désignant une surface (ou terrasse) qui s'est formée le long d'une ancienne marge glaciaire et qui s'est développée suite au dépôt de sables, de graviers et de limons par des ruisseaux qui coulaient le long de la lisière du glacier. Lors du retrait et de la fonte du glacier, il pouvait y avoir un espace entre la glace qui fondait et un versant de la vallée (qui était alors libre de glace), espace où les eaux glaciaires s'écoulaient. Si la pente longitudinale de cet espace n'était pas trop forte, sédiments, sable et gravier s'y sont lentement accumulés, générant une surface relativement plane ou légèrement en pente, et surélevée par rapport au niveau du sol où se trouvait la base du glacier. La lente accumulation sédimentaire et la fonte du glacier ont laissé derrière elles ces vestiges : les terrasses de kame. Cette forme du paysage, surélevée par rapport au sol environnant, est un endroit qui a souvent eu la faveur des hommes pour s'y établir. Quelques exemples dans la vallée de la Durance :
Parfois, ces terrasses glaciaires se superposent et permettent ainsi de retracer les différents stades d'avancée et de recul des glaciers. Un exemple nous aidera à mieux comprendre la formation de ces résidus glaciaires. Un cas d'école : la terrasse de Châteauroux à Embrun
Ainsi que nous l'avons précisé, la vallée de la Durance est riche en terrasses alluviales. Nous nous intéressons ici à « la » terrasse de Châteauroux (Hautes-Alpes). Celle-ci est la continuation, vers l'amont, de la terrasse sur laquelle est construite la ville d'Embrun. Formation de la terrasseAu maximum du Würm, le glacier de la Durance atteignait au droit d'Embrun une épaisseur de l'ordre de 1000 m, sa surface se situant à 1800 m d'altitude environ (voir la page sur l'altitude du glacier de la Durance). Vers la fin de cette glaciation, ombre de lui-même, il n'atteignait plus, à cet endroit, qu'une épaisseur de 100 à 150 m. Le glacier devait se situer au centre de la vallée. Toutefois, la présence de la terrasse de kame n'est attestée que sur la rive droite de la vallée. La rive gauche ne comporte aucune trace de tels sédiments. L'explication peut être la suivante :
Ces deux glaciers avaient pour effet de repousser en rive droite les eaux de fonte, comme nous l'avons expliqué à la page sur les versants d'érosion glaciaires. De ce fait, le volume des eaux glaciaires en rive droite y devenait plus important. Avec une pente longitudinale relativement faible, ces eaux ont pu s'écouler en déposant les matériaux (cailloux, graviers, sables, limons) qu'elles transportaient. Lentement, au fil du temps, de l'amont de Châteauroux (chapelle St James) à l'aval d'Embrun, ces matériaux se sont accumulés sur une épaisseur de plusieurs dizaines de mètres (la hauteur de la falaise d'Embrun est aujourd'hui d'environ 80 m). « La » terrasse de Châteauroux
En aval du village, « la » terrasse se subdivise en deux terrasses parallèles, d'altitudes différentes, légèrement décalées le long de l'axe de la vallée (d'où les guillemets de « la » terrasse qui, en fait, n'est pas unique). Il existe en effet :
Ces deux terrasses se sont chacune formées lors de positions différentes du glacier donc à des époques différentes.
Composition de « la » terrasseElle est composée d'un cailloutis de galets émoussés variés, résultat d'une accumulation fluviatile durant la dernière glaciation : le Würm. Les cailloux roulés par les eaux glaciaires ont été déposés conjointement à des matériaux plus légers.
Les eaux glaciaires s'écoulaient parallèlement au glacier et percolaient en cimentant le cailloutis sous-jacent. Ces eaux de fonte glaciaires, chargées en CO2, plus les eaux de fonte nivales, encore plus chargées, dissolvaient les calcaires en formant des carbonates. Ayant pénétré le sol, le niveau de ces eaux pouvait varier suivant le volume des eaux circulant en surface (fonte plus ou moins importante, sècheresse). La topographie onduleuse du lit d'écoulement, formée de chenaux anastomosés, pouvaient aussi engendrer des « mouilles » où s'accumulaient les éléments plus légers. Formation de « la » terrasse de ChâteaurouxAu pléniglaciaire würmien, le glacier de la Durance occupe la totalité de la vallée sur une épaisseur de plusieurs centaines de mètres. Puis, les étapes de la formation semblent être les suivantes :
En résuméLa formation des terrasses de kame est due à :
En dernier lieu, la durée d'écoulement de ces eaux, le volume des sédiments déposés et la puissance de l'érosion postglaciaire détermineront la hauteur de la terrasse résiduelle.
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Mise à jour le Jeudi, 10 Novembre 2016 10:16 |