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Textes, croquis et photos (sauf mention contraire) Claude Beaudevin (1928 - 2021) Présentation et mise en page Bruno Pisano 

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Application de la méthode des sites témoins aux vallées de la Roya et de la Bévéra pour la glaciation du Mindel PDF Imprimer Envoyer
Écrit par Administrateur   
Samedi, 06 Avril 2013 12:34

Version du 5 avril 2013

La vallée de la Roya

Nous ne reviendrons pas sur l'exposé de cette méthode des sites témoins, que le lecteur pourra consulter par ailleurs.

La vallée de la Roya (Alpes-Maritimes) fournit un bon exemple de la méthode. Il est connu qu'au Würm, les glaciers descendaient jusqu'à 1000 m d'altitude environ dans le haut des vallées de la Tinée, de la Vésubie et de la Roya. Mais, qu'en était-il lors des glaciations précédentes et peut-on retrouver dans les paysages les traces, par exemple, de la glaciation du Mindel

Voici, pour débuter, une esquisse de la partie moyenne de la vallée de la Roya

établie avec l'aide de Google Maps Relief.
Vallée de la Roya

En utilisant la carte IGN au 1/25 000e, consultée sur Geoportail, ainsi qu'à l'aide d'observations sur place, nous avons repéré toutes les arêtes sensiblement perpendiculaires au talweg puis nous y avons reporté les épaulements. Les repères RO suivis d'un nombre et de leur altitude permettent de retrouver ces sites ainsi que leurs caractéristiques sur le tableau visible ici.

Le premier tri consiste à ne retenir que les sites situés sur des arêtes plongeant dans la vallée principale et sensiblement perpendiculaires au talweg.

Voici le résultat obtenu :

Vallée de la Roya
 

Deuxième tri : suppression des sites les moins élevés sur chacune des arêtes, qui ont été représentés en vert et en jaune sur la figure précédente.

Résultat :

Vallée de la Roya
 

Troisième tri : suppression des sites dus à des diffluences au-dessus des arêtes. C'est le cas d'un seul site, celui de Pratolin, représenté ici en rouge, dont l'origine glaciaire est certaine : son versant nord est constitué par une magnifique prairie, qui surprend dans ces terrains caillouteux : ceci révèle un sol riche en argile, que ne peut expliquer la géologie locale, mais qui est le signe d'un déversement, au-dessus de l'arête, d'eau de fonte d'une diffluence du glacier du vallon de Caïros.

Il s'agit donc d'un site probant.

La prairie de Pratolin (Alpes Maritimes)

La prairie de Pratolin

Cette remarque est d'ailleurs assez générale : de riches prairies, fréquenté par des bovins - et non par ces bêtes polluantes que sont les brebis - sont synonymes de terrains glaciaires.

Toutefois, très souvent, ils ne sont pas reconnus comme tels par les cartes géologiques qui les considèrent comme des éboulis !...

 

Résultat du troisième et dernier tri :

 

A l'issue de ces tris successifs, ne demeurent donc, dans cette partie médiane de la Roya, que trois sites témoins.

Vallée de la Roya

Nous avons effectué la même série d'opérations sur l'ensemble du cours de la Roya. Nous ne ferons figurer ici que le tronçon du cours de la Roya directement situé au sud de celui qui précède, en raison de l'intérêt particulier que présente le site de la Lagouna. Celui-ci est en effet indiscutablement d'origine glaciaire et mérite une étude plus poussée que l'on pourra lire ici.

Vallée de la Roya et site de la Lagouna

 
Un tableau qui regroupe les sites retenus dans cette étude à l'issue du troisième tri est visible ici.
 

Ainsi que nous le disions ci-dessus, il peut arriver parfois - quoique rarement - que cette recherche aboutisse à sélectionner un site témoin situé nettement plus bas que ses voisins. Comme la surface d'un glacier ne peut être que constamment descendante, il semble y avoir ici une erreur. Ce n'est pourtant pas le cas, en voici un exemple.

Le site RO58 (col de Loubaïra, 1021 m), est un sommet d'épaulement situé sur une arête descendue du Chaberta (1286 m), rive gauche de la Roya, arête sur laquelle n'existe aucun site témoin plus élevé.

La raison en est la suivante : au-dessus du mont Chaberta, l'arête qui porte le col de Loubaïra continue à s'élever jusqu'à l'épaule est du mont Bergiorin (1632 m). Sur cette arête, se trouve un petit épaulement aux environs de 1400 m. Mais, surtout, ainsi qu'on peut le voir sur la carte d'ensemble ci-dessous, les sites témoins dans les environs de La Brigue se situent tous entre 1300 et 1400 m, soit une altitude de surface du glacier de l'ordre de 1350 à 1450 m. La confluence du glacier de la Roya et de son affluent de La Brigue se présentait donc comme une surface de glace large de plus de 4 km.

Si on se rend à l'extrémité est de cette surface, dans la vallée de La Brigue, on découvre un épaulement à pommeau remarquable (RO76) à 1374 m sur l'arête sud de la Cime des Lardiéres (1544 m). Cette arête n'est certes pas perpendiculaire au cours de la Roya lui-même, mais à celui de la vallée de La Brigue. Il fournit donc une indication valable de l'altitude de surface du glacier au-dessus de la Brigue, qui est la même que celle du glacier de la Roya , étant donnée la largeur de la vallée à cet endroit.

L'existence du site RO76 permet ainsi de confirmer la règle du 2ème tri : suppression des sites les moins élevés sur chacune des arêtes, dans notre cas suppression du site RO58.

Saint Dalmas de Tende, Alpes-Maritimes

Dans d'autres cas, l'existence d'un site à une altitude qui peut sembler paradoxale, pourra s'expliquer par le fait que l'arête où il se situe ne comporte pas, au dessus de lui, de roche suffisamment résistante pour se prêter à la formation d'un épaulement.

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La vallée de la Bévéra

Dans la partie basse du cours de la Roya, de Breil sur Roya jusqu'à la frontière italienne, les sites témoins semblent se disposer de manière assez complexe. Mais cette impression disparaît si l'on considère l'ensemble des deux glaciers de la Roya et de la Bévéra, qui confluaient dans cette région. Les glaces de la Bévéra ont eu en effet une action importante sur la partie inférieure du glacier de la Roya, car, même si elle provenaient de reliefs moins élevés, ceux-ci se situaient beaucoup plus près que leurs homologues du haut bassin de la Roya : l'Authion se trouve à 18 km de la confluence, au lieu d'une trentaine de kilomètres pour le mont Clapier.

On peut consulter ici les sites témoins de la partie basse de la Bévéra, déterminés en utilisant la méthode des tris successifs.

La carte ci-dessous indique la situation et l'altitude de l'ensemble des sites retenus pour la Roya et la Bévéra.

La Roya et la Bévéra dans les Alpes-Martimes

Bien entendu, ces altitudes ne sont pas précises au mètre près ! Si nous avons indiqué certaines d'entr'elles avec une pareille précision, c'est seulement pour faciliter la consultation des cartes, sur lesquelles elles figurent souvent. Rappelons également qu'il s'agit de l'altitude des sites témoins eux-mêmes. Pour obtenir celle de la surface du glacier, on ajoutera une cinquantaine de mètres aux valeurs de la carte.

Nous n'avons pas tracé les glaciers eux-mêmes, ne disposant pas du logiciel convenable. Mais les altitudes figurant sur la carte permettent de s'en faire une idée assez précise ; en particulier, on notera que la surface du glacier de vallée de la Roya au pléniglaciaire de la glaciation du Mindel s'élevait environ à :

  • 1400 m au-dessus de Tende,

  • 1350 m vers La Brigue,

  • 1100 m vers Fontan et Saorge,

  • 800 m vers Breil sur Roya

  • et 750 m au franchissement de la frontière italienne.

Compte tenu de la grande variété des terrains que l'on rencontre tout au long du cours de la Roya, il est exclu que les sites témoins - sommets d'épaulement entre autres - proviennent d'une même strate de terrain dur, résistant à l'érosion, d'un bout à l'autre de la vallée.

À l'ouest de la vallée de la Bévéra, celle du Paillon, le cours d'eau - pardon, le fleuve ! - qui arrose Nice, nous fournit également un terrain d'application très intéressant, car il permet de suivre le tracé d'un glacier jusqu'à une très courte distance de son extrémité. Et, surtout, il permet de répondre à une question fréquemment posée : « Ne rencontre-t-on pas également des épaulements dans des massifs qui n'ont jamais vu passer de glaciers ? ».

Mais l'enseignement le plus important de cette étude des vallées de la Roya, de la Bévéra et du Paillon réside dans le fait qu'elle montre que la méthode utilisée fournit des résultats très cohérents et vraisemblables.

Revoir le site, particulièrement intéressant, de la Lagouna.

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Mise à jour le Vendredi, 26 Avril 2013 11:30