Les anciens lacs du bassin du Drac Imprimer
Écrit par Claude Beaudevin   
Mardi, 08 Mars 2011 19:24
Version 78

L'essentiel

Le bassin du Drac : nous le définirons comme l'ensemble des vallées du Drac et de ses affluents (sur la rive gauche, la Souloise, l'Ebron et la Vanne et, sur la rive droite, la Séveraissette, la Séveraisse, la Bonne et la Roizonne), entre le débouché de ces rivières au sortir de leur hautes vallées et, vers l'aval, une ligne joignant Monestier de Clermont à La Mure.

Le bassin du Drac est une région privilégiée pour l'étude de certaines formes glaciaires, les terrasses. Celles-ci, qui marquent de manière remarquable le paysage, ont succédé à d'immenses lacs qui occupaient les vallées lors des dernières glaciations et qui ont aujourd'hui totalement disparus. La carte ci-dessous montre l'extension des glaciers au maximum du Würm (Würm II). Seuls les principaux lacs ont été figurés.

Les lacs du bassin du Drac

On comparera utilement cette carte à celle des glaciers rissiens (ci-dessous) à leur maximum d'extension.

La différence est saisissante !

Le bassin du Drac au Riss

Si les terrasses sont les éléments les plus remarquables du bassin du Drac, c'est en partie parce qu'aucune rivière importante n'a succédé aux grands glaciers quaternaires, ce qui la différencie de la plupart des grandes vallées alpines. Ainsi une grande partie des dépôts a-t-elle pu subsister jusqu'à nos jours.

Mais, tout d'abord, pourquoi des lacs aussi importants ont-ils occupé les vallées du Drac et de ses affluents ?

Pendant la glaciation würmienne, les glaciers affluents n'ont fait qu'une timide apparition dans cette vallée. Bonne et Séveraisse se sont contentées de barrer localement la vallée du Drac en face de leurs débouchés. En amont de ces barrages se sont donc développés un certain nombre de lacs, les principaux étant ceux du Beaumont et du Champsaur. Plus bas dans la vallée, les eaux du Drac rencontraient un nouvel obstacle : la langue frontale du glacier de l'Isère et sa moraine, barrage qui donnait naissance au plus important des plans d'eau, le lac du Trièves.

Tous ces lacs se sont progressivement comblés, remplis par les alluvions apportées par le Drac et ses affluents. Ces dépôts - tout au moins ceux qui n'ont pas été emportés par l'érosion postglaciaire - sont à l'origine des terrasses, au plancher presque parfaitement horizontal. Mais pas tout à fait horizontal quand même... La surface d'une terrasse présente en effet, de l'amont à l'aval, une faible pente, de l'ordre de quelques mètres pour une dizaine de kilomètres, pente qui dépend des conditions dans lesquelles s'est effectué le dépôt, ainsi que nous l'avons vu à la page sur les dépôts glacio-lacustres. Des facteurs secondaires peuvent également jouer, tels les apports provenant des flancs de la vallée ou le tassement différentiel des dépôts, fonction de leur nature et de leur épaisseur.

Nous avons dit : barrage par les glaciers ; certes, mais il peut exister plusieurs variantes à ce schéma :

  • soit - et c'est le cas du lac du Trièves - les eaux s'échappent par un déversoir latéral. Le niveau du lac reste alors constant et égal à celui du déversoir,

  • soit les eaux franchissent l'obstacle du glacier en s'écoulant entre la rive et le front du glacier ou sa moraine. Dans ce cas, le niveau du lac varie avec l'avancement du glacier. C'est le cas du lac du Beaumont,

  • soit, enfin, si l'épaisseur du glacier n'est pas trop importante, les eaux peuvent s'infiltrer à travers celui-ci par un réseau de crevasses. C'est, semble-t-il, le cas du lac du Champsaur.

Enfin, on peut évoquer la possibilité de vidange brutale du lac, de débâcle, signalée à la page sur le lac du Trièves.

Avant d'en venir à l'étude des lacs proprement dite, il nous faut parler d'une forme glaciaire caractéristique, les chenaux sous-glaciaires latéraux, qui va nous aider à comprendre le cheminement des eaux glaciaires.

 

Les chenaux sous-glaciaires latéraux

Ces chenaux ont été creusés par les eaux circulant sous la surface du glacier. Les observations sur le terrain (Louis Reynaud à la Mer de Glace), rejoignant les résultats obtenus par le calcul, montrent qu'aux altitudes moyennes, les eaux de fonte des glaciers circulent, de préférence, le long des rives, à une profondeur maximum d'une centaine de mètres environ sous la surface. Pour en savoir plus sur la circulation des eaux glaciaires.

Lorsque ces eaux de fonte, longeant la rive du glacier, rencontrent un obstacle, telle une arête en saillie sur le flanc de la vallée, elles y impriment, à une centaine de mètres donc sous la surface de la glace, des formes caractéristiques, que nous nommerons chenaux sous-glaciaires latéraux. Parvenus plus près du front du glacier, les écoulements gagnent le fond du thalweg et s'échappent par d'autres chenaux, de type différent, les chenaux marginaux externes.

Les chenaux sous-glaciaires latéraux se lisent maintenant dans les paysages sous forme de vallées mortes, dépourvues de bassin de réception des eaux pluviales et qu'aucun cours d'eau important, susceptible d'en avoir effectué le creusement, ne parcourt actuellement. Ce sont les marqueurs du passage de la glace et des eaux glaciaires. Ils révèlent la position de la surface des glaciers et permettent dans certains cas, ainsi que nous le verrons plus loin, de comprendre la raison de l'altitude des lacs.

Nous pouvons étudier à présent plus en détail les anciens lacs du bassin du Drac : lacs du Trièves, du Beaumont et du Champsaur :

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Mise à jour le Dimanche, 13 Octobre 2013 06:52